Les exploits oubliés : Luca Badoer, Europe 1999

Publié le par Masta

Les exploits oubliés : Luca Badoer, Europe 1999

Quand on pense à Luca Badoer, le souvenir qui revient le plus souvent est celui de ses deux piètres remplacements de Felipe Massa chez Ferrari en 2009. Mal préparé, sur une monoplace imparfaite et avec la pression reposant sur ses épaules, l'Italien aura attiré beaucoup de commentaires ironiques sur ses prestations de Valence et Spa où il monopolisa la dernière position en qualifications comme en course. Pourtant, à l'origine, celui qui a été le pilote essayeur de Ferrari durant l'ère Schumacher ne manquait pas de talent, et fut proche d'un petit exploit en 1999, dix ans avant son intérim malheureux.

Champion de F3000 en 1992 – devant notamment Rubens Barrichello – Badoer eut le malheur de se coltiner une flopée de monoplaces italiennes au mieux trop lentes comme les Minardi en 1995 et 1999, au pire totalement larguées comme la Lola de 1993 ou la Forti de 1996. Dans ces conditions, il était difficile de prouver concrètement sa valeur, si bien qu'il ne marqua pas le moindre point en 50 départs, ce qui est aujourd'hui le record en la matière. Pourtant l'Italien avait fait jeu égal avec le regretté Michele Alboreto pour sa première saison, et n'a pas fait moins bien que Pedro Lamy ou Marc Gene, lesquels eurent, eux, l'occasion de marquer une unité pour Minardi.

Ce ne fut hélas pas suffisant pour que Ferrari le choisisse pour remplacer Michael Schumacher en 1999 après que l'Allemand se soit cassé la jambe à Silverstone. La Scuderia préféra recruter Mika Salo, ce qui fait ironiquement écho à la situation de Lotus fin 2013 : on préféra un pilote finlandais (Heikki Kovalainen) au troisième pilote italien (Davide Valsecchi). Si Badoer ne l'a pas bien prit, il ne se laissa pas abattre, jusqu'à briller dans un Grand Prix d'Europe rocambolesque mais splendide.

Qualifié dix-neuvième, l'Italien évita le chaos du premier virage avec l'accident de Diniz et ne se laissa pas embarquer dans la partie de poker menteur de la météo, très changeante ce jour-là. Progressant dans le classement au fil des arrêts aux stands au mauvais moment – notamment pour Mika Hakkinen, alors leader du championnat – et des abandons en tête de course, la Minardi se retrouva à vingt tours de l'arrivée dans le top 6, devant Eddie Irvine et Hakkinen, les deux rivaux direct pour le titre ! Mieux encore, avec le tête à queue éliminatoire de Giancarlo Fisichella et la crevaison de Ralf Schumacher, Badoer monta de deux crans dans le classement pour figurer quatrième ! La voie était libre pour un authentique exploit, son équipe n'ayant plus atteint cette position depuis six ans.

C'est alors qu'à la fin du cinquante-quatrième tour, le carter de la boîte de vitesses de la Minardi – une pièce qui n'a quasiment jamais été une cause d'abandon – se fendit, laissant apparaître une fumée blanche à l'arrière de la monoplace. C'en était fini des espoirs de points de Badoer, qui laissa mourir sa voiture à l'entrée des stands. Effondré, l'Italien fondit en larmes au bord de son cockpit, laissant apparaître toute la pression et l'émotion d'un pilote de F1 de fond de grille qui manquait de peu un résultat remarquable, duquel il n'allait plus jamais s'approcher...

Revenant dans l'ombre en assurant les essais privés pour Ferrari, Badoer apporta discrètement sa pierre à l'édifice de la Scuderia qui domina la première moitié des années 2000. Quand celle-ci offrit enfin sa chance à l'Italien en remerciement de ses bons et loyaux services, il était bien trop tard. Badoer finit sa carrière en Formule 1 sous les railleries, dix ans après avoir ému les téléspectateurs en noyant son chagrin causé par une pièce jusque là incassable...

Luca Badoer, une autre illustration de l'injustice en Formule 1...

Luca Badoer, une autre illustration de l'injustice en Formule 1...

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