Les batailles d'Angleterre : 10 Grand Prix marquants

Publié le par Masta

Les batailles d'Angleterre : 10 Grand Prix marquants

Le Grand Prix de Grande Bretagne est le seul avec le Grand Prix d'Italie à s'être retrouvé au calendrier chaque année depuis les débuts en 1950. Il n'est donc pas surprenant de retrouver des éditions qui, chacune à leur manière, ont contribué à écrire l'Histoire. De l'anecdote sympathique à l'événement mémorable. Revenons sur 10 d'entre elles.

[Retour sur l'édition 1951 ici]

- Silverstone 1954. Mercedes dominait – déjà – son monde avec Juan Manuel Fangio notamment. La W194 détonnait avec sa carrosserie enveloppant les roues qui était diablement efficace sur les circuits rapides, comme à Reims où elle y fit des débuts tonitruants, plus tôt dans la saison. Or cette carrosserie pouvait poser des problèmes de visibilité sur des tracés plus sinueux, comme Silverstone. Les Mercedes ont ainsi passé leur temps à heurter les bidons d'huile qui délimitaient la piste, étant donné qu'il était impossible pour eux de les distinguer depuis leur cockpit ! Tout bénéfice pour Jose Froilan Gonzalez qui doubla la mise après son triomphe de 1951. Ce fut cependant son dernier succès.

- Aintree 1955. Il s'agissait de la première course (sur cinq) se déroulant sur cet hippodrome. Le public eut le privilège de voir triompher un des leurs : Stirling Moss, qui remportait sa première victoire sur Mercedes et devant Fangio. Néanmoins, le doute demeurera : était-ce à la régulière ou l'Argentin avait-il fait une faveur à son cadet, se sachant assuré du titre mondial ? Le Champion sans Couronne lui demandera régulièrement mais Fangio assura jusqu'à sa mort qu'il n'avait pas levé le pied. Il est très probable que le quintuple champion du Monde, sentant le grand talent de l'Anglais, ait laissé son équipier briller devant les siens et choisi de ne jamais l'avouer. Sacré personnage.

- Aintree 1957. Moss doubla la mise au même endroit mais cette fois avec une monoplace de la même nationalité, en l'occurrence Vanwall. La première victoire 100% britannique à domicile depuis 1923. Pourtant, celle-ci a bien failli lui échapper lorsqu'un allumage défaillant l'obligea à renoncer. Heureusement pour lui, le règlement permettait encore de prendre le relais d'un équipier et de partager le résultat final avec lui. Ce fut la troisième "double victoire" et la dernière puisque cette règle n'allait pas tarder à disparaître des textes législatifs. Tony Brooks, autre excellent pilote anglais sans titre, céda donc sa monoplace à Moss, qui remonta de la neuvième place à la première. Cette fois, il n'y avait aucun cas de conscience.

- Silverstone 1975. Un cliché vieux comme Bernie Ecclestone prétend qu'un temps anglais est forcément un temps pluvieux. Celui-ci fut particulièrement capricieux l'année du premier titre de Niki Lauda. Deux averses s'invitèrent sur l'ancien aéroport militaire et c'est Emerson Fittipaldi qui en tira le meilleur parti pour son dernier succès. Il resta en slicks lors de la première, évitant ainsi une série d'arrêts aux stands et s'arrêta avant que la seconde n'éclate.. et n'envoie une dizaine de pilotes hors piste ! Seuls six resteront sur l'asphalte pour distinguer le drapeau rouge, d'où un classement établi selon le tour précédent et où seuls Fittipaldi et Vittorio Brambilla (sixième) ne se sont pas accidentés. L'Italien se rattrapa en Autriche de la manière que l'on sait !

- Brands Hatch 1976. Cette saison connut moult péripéties mais le film Rush n'a pas fait mention de celle-ci. Après une mésentente au départ, James Hunt s’accrocha avec Clay Regazzoni, équipier de son rival Niki Lauda. La course fut interrompue et relancée avec les pilotes ayant bouclé le premier tour du premier départ... ce qui n’était pas le cas de Hunt, qui n’a ramené sa M23 qu’après. Mclaren prit le temps de réparer la monoplace de leur pilote et pour cause : craignant un soulèvement du public qui commençait à bombarder les officiels de canettes vides (!), la direction de course finit par autoriser la présence de Hunt au second départ ! Lequel s’était déchiré les ligaments du pouce sans l’avoir remarqué, et qui après une quarantaine de tours à harceler Lauda le déborda pour remporter son Grand Prix national. Ferrari porta réclamation après coup, et la FIA finit par disqualifier la Mclaren, laissant la victoire à Lauda.

- Silverstone 1977. Hunt prit sa revanche douze mois plus tard. A défaut de conserver son titre mondial (la M23 était dépassée et la M26 n'était pas aussi fringante), l'Anglais remporta ses trois dernières victoires, dont celle-ci à Silverstone devant Lauda et l'espoir suédois Gunnar Nilsson, hélas bientôt atteint d'un cancer. Cette course reste célèbre pour des débuts historiques : ceux de Renault et Michelin avec le moteur turbocompressé et la carcasse radiale qui allaient marquer l'Histoire mais la "Yellow Tea Pot" (théière jaune) n'en était pas encore là à cet instant... A côté, Gilles Villeneuve - conseillé par Hunt lui-même après une course de Formule Atlantic où il était invité - se fit la main sur une troisième McLaren. Il se qualifia devant le deuxième pilote Jochen Mass, non sans avoir fait un tête-à-queue à chaque portion du circuit durant les essais... mais sans caler ni endommager la voiture. La mécanique l'empêcha de concrétiser en course mais la légende était en marche.

- Silverstone 1979. Deux ans après, McLaren traversait une période de crise. On attendait davantage une Ligier ou une Ferrari, l'équipe française ayant dominé le début de saison tandis que la Scuderia leur emboîtait le pas. Or l'équipe Williams affichait des promesses non concrétisées avec la FW07. Ce fut chose faite à Silverstone, mais non pas avec leur chef de file, l'Australien bourru Alan Jones. Le futur Champion du Monde menait la course à l'origine après avoir signé la pole position mais une pompe à eau défectueuse le força à lâcher prise. Ce fut son équipier Clay Regazzoni, que l'on n'espérait plus à pareille fête, qui l'emporta à 40 ans bien sonnés. Comme Gonzalez et Fittipaldi, cela resta son dernier succès, fêté avec... du jus d'ananas, par égard au sponsor Saudia Airlines qui n'aurait pas vu d'un bon œil la présence d'alcool !

- Silverstone 1981. Nouveau saut de deux ans pour une autre première à Silverstone : le premier succès d'une monoplace en coque de carbone. Ayant jusque là privilégié l'aluminium comme les autres équipes, McLaren profita du soutien accru de Marlboro et de l'arrivée de Ron Dennis, jeune manager ambitieux, pour choisir cette voie inédite sous l'impulsion de John Barnard. Avec la progression sensible mais réelle des turbos et l'opposition de Brabham et Williams, une victoire semblait difficile à concevoir. D'autant plus qu'après trois tours, John Watson échappa de peu à un accrochage impliquant Gilles Villeneuve, Jones et son équipier Andrea De Cesaris. Mais l'Irlandais du Nord remonta petit à petit, avant de profiter de l'abandon de René Arnoux pour imposer la MP4/1. Aujourd'hui, le carbone est incontournable.

- Silverstone 1995. Terre de premières ou de dernières, Silverstone consacra un nouveau pilote parmi les vainqueurs de Grands Prix : Johnny Herbert. Grièvement blessé aux jambes à Brands Hatch en 1988, le Britannique fut coupé en plein élan et aurait peut-être connu une carrière plus brillante sans ce carambolage. Néanmoins, grâce à l'accrochage impliquant son équipier Michael Schumacher et son compatriote Damon Hill, trop optimiste, Herbert récolta les lauriers de la victoire avec l'équipe qui l'a fait débuter en 1989, Benetton. David Coulthard le menaça un temps avant de rétrograder, pénalisé pour vitesse excessive dans les stands. Derrière, Mark Blundell résista de manière peu cavalière à Rubens Barrichello, d'où un accrochage à trois tours de l'arrivée, privant le Brésilien de train avant et causant une crevaison au Britannique.

- Silverstone 1997. Seules trois équipes ont passé la barre symbolique des 100 victoires en Formule 1. Ferrari s'est offerte ce luxe lors du Grand Prix de France 1990 avec Alain Prost tandis que McLaren a franchi ce pallier au Grand Prix du Brésil 1993 avec Ayrton Senna. Après avoir globalement dominé la décennie 1990, Williams était donc la suivante sur la liste, après la victoire de Jacques Villeneuve en Espagne en 1997. Un heureux concours de circonstances fit que la centième se déroula à Silverstone, soit à domicile et dix-huit ans après leur premier triomphe ici-même. Celle-ci a bien failli leur échapper lors du premier ravitaillement à cause d'un souci d'écrou de roue, avatar traditionnel de l'équipe. Relégué hors des points, Villeneuve devait donc refaire surface et profita des abandons de Michael Schumacher – son rival pour le titre – et de Mika Hakkinen pour triompher devant Jean Alesi et Alex Wurz. L'Autrichien signait son premier podium pour sa troisième course.

Nul doute que le Grand Prix nous offrira d'autres grands moments !

La Mercedes W196 de Fangio, cabossée par les bidons délimitant la piste

La Mercedes W196 de Fangio, cabossée par les bidons délimitant la piste

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