Prêts à partir : les débuts en fanfare des équipes

Publié le par Masta

Un nouveau team ne s’attend généralement pas à briller dès sa première course. En débarquant dans un milieu qu’il ne connaît guère, le premier objectif est d’apprendre un maximum pour pouvoir ensuite briller au mieux. Cependant, il est déjà arrivé que certaines équipes, par opportunisme ou par talent, aient marqué un grand coup d’entrée de jeu.

 Prêts à partir : les débuts en fanfare des équipes


Victoire d'entrée de jeu

Si Mercedes domine la F1 actuellement, le constructeur à l’étoile n’en est pas à son coup d’essai. Il domina l’ère des « Titans » de l’entre-deux guerres grâce aux moyens colossaux que lui offrait l’Allemagne nazie et lorsqu’il revint en 1954, une fois les plaies de l’affrontement mondial pansées, Mercedes ne fit pas dans la dentelle. En douze participations, les Flèches d’Argent s’imposèrent à neuf reprises ! La première fois eut lieu à Reims pour le Grand Prix de France. Avec le Maestro Juan-Manuel Fangio et l’ingénieur germanique Karl Kling au volant des futuristes W196, Mercedes tourna autour de ses adversaires et les relégua tous à un tour. Kling se permit même de menacer un temps son supposé leader avant de lâcher prise. Le ton était donné d’entrée, même si les W196 chutèrent lors de la course suivante à Silverstone et pour cause : la carrosserie enveloppante alourdissait la direction et empêchait les pilotes de distinguer les bidons d’huile qui délimitaient la piste !


Au moins, les débuts triomphaux de Mercedes étaient en soi logiques. Deux décennies plus tard en 1977, personne n’attendait l’écurie Wolf à pareille fête. Ayant fait fortune dans le pétrole au Canada, l’Autrichien Walter Wolf avait pourtant engagé du beau monde pour commencer : le designer Harvey Postlethwaite, l’homme derrière les belles Hesketh de James Hunt ; Peter Warr, le bras droit de Colin Chapman chez Lotus et Jody Scheckter, ancien chien fou depuis assagi et ayant fait triompher l’improbable Tyrrell à six roues. En partant onzième sur l’autodrome Oscar Galvez de Buenos Aires, il pouvait au mieux espérer quelques bons points. C’était sans compter sur la chaleur étouffante de l’Argentine qui fit tomber les monoplaces comme des mouches, des Ferrari aux McLaren en passant par les Lotus. Les Brabham furent les dernières à chuter, laissant Jody Scheckter seul en tête et imposant la splendide WR1. Pour faire bonne figure, il remporta deux autres courses et finit vice-champion…

Or, si le succès de Wolf vint de nulle part, que dire de Brawn GP il n’y a pas si longtemps ? Fin 2008, il était encore question de Honda, sauf que le constructeur préféra retirer ses billes à l’heure où l’économie mondiale n’était plus au beau fixe. Alors que Virgin aurait pu sauter sur l’occasion, la firme de Richard Branson se contenta d’être un simple sponsor, laissant l’ancien directeur technique Ross Brawn prendre les commandes de sa propre équipe et reconduire Jenson Button et Rubens Barrichello. Ironie de l’histoire : si Honda avait continué, Rubens aurait laissé sa place à Bruno Senna, le neveu du pilote qui l’avait soutenu en début de carrière. Pour le coup, la Formule 1 se montra plus que compatissante envers cette équipe puisqu’elle monopolisa la première ligne et signa un doublé ! Et pourtant, Barrichello avait semé des morceaux d’aileron avant ici et là sur le circuit de Melbourne mais Sebastian Vettel et Robert Kubica, en bataille entre les Brawn, s’auto-éliminèrent en vue du but. En fin de saison, Button avait remporté le titre mondial tandis que Brawn cédait sa place au constructeur qui avait remplacé Honda sous le capot : Mercedes. On prend les mêmes…

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Promesses (pas toujours) tenues...

Les observateurs ne manquèrent pas de sourire devant l’évolution de cette équipe puisque avant Brawn et Honda, il y avait BAR mais surtout Tyrrell. L’équipe de « Oncle Ken » a marqué l’Histoire de la Formule 1 et son fondateur s’est fait (re)connaître pour avoir lancé un bon nombre de pilotes fort talentueux. Outre Jody Scheckter, Michele Alboreto et Martin Brundle ont fait leurs gammes pour l’équipe à la livrée bleu nuit et grâce à l’appui d’Elf, beaucoup de français eurent leur chance dans cette équipe, de François Cevert à Didier Pironi en passant par Patrick Depailler. Si on doit à Jean Alesi les dernières heures de gloire de Tyrrell, son pilote le plus emblématique reste Jackie Stewart qui signa d’emblée la pole position fin 1970 au Canada. S’il ne put concrétiser en course, le potentiel de sa monoplace, inspirée de la Matra MS80 victorieuse de 1969, était évident. En 1971, le paddock eut la confirmation avec le titre mondial de Tyrrell et de son Écossais fétiche.

Stewart en fut soulagé, lui qui se coltina en 1970 une March particulièrement instable ou en d’autres termes, un « taureau sauvage ». L’équipe était composée d’un quartet dans lequel figurait un certain Max Mosley et s’inscrivit au championnat avec pas moins de six monoplaces ! Stewart se retrouva au milieu de tout cela car Ken Tyrrell avait coupé les ponts avec Matra, décidé à conserver le Ford Cosworth et peu convaincu par le V12 Matra, aussi beau qu’il puisse sonner. En dépit d’une monoplace construite dans la précipitation, Stewart s’adjugea le meilleur temps et réussit à conserver une place sur le podium. La victoire allait venir lors de la deuxième course mais ce fut la seule, une fois que Lotus lança sa mythique 72 et que Ferrari mit au point sa superbe 312. Comprenant qu’on n’était jamais mieux servi que par soi-même, Tyrrell fit en sorte de construire sa propre monoplace dans le plus grand secret. On connaît la suite.

Si Tyrrell devint un nom reconnu et si March se fit remarquer à l’occasion, Lancia ne fit que passer en Formule 1. Là où Mercedes fut prêt à partir de la troisième course de la saison 1954 mais tout en réussissant à s’imposer au championnat, Lancia débarqua pour la dernière épreuve du championnat, au détriment d’un Alberto Ascari qui avait patienté en pure perte. Certes, sa D50 présentait des paramètres originaux pour l’époque avec ses réservoirs installés dans les pontons latéraux mais elle était aussi fragile que compliquée à piloter. Ascari s’imposa en qualifications et réalisa le meilleur tour en course mais il ne vit pas l’arrivée. Dommage car ce Grand Prix d’Espagne sur l’éphémère circuit de Pedralbes consacra l’une des rares défaites de Mercedes, Mike Hawthorn l’emportant sur la Ferrari « Squalo ».

 Prêts à partir : les débuts en fanfare des équipes

De Charybde en Scylla...

Autre constructeur parti la queue entre les jambes en Formule 1 : Toyota. Grand gâchis de la décennie précédente, l’ancien premier constructeur mondial avait pourtant couvert des kilomètres par paquets de mille en 2001 mais ne cherchait qu’à se qualifier pour sa première course. Le carambolage du départ suivi par une hécatombe dont Melbourne était coutumier à l’époque permit à Mika Salo de marquer un point. Et encore, un deuxième était en vue mais le rookie Mark Webber était décidé à briller devant les siens… Espoirs déçus par la suite, tout comme pour Prost. Il s’avéra par la suite que les dés étaient pipés dès la reprise de Ligier mais en 1997, personne ne pouvait s’en douter, surtout après une bonne première saison marquée par les deux podiums d’Olivier Panis et les premiers points d’entrée de jeu, également à Melbourne.

Et parmi les équipes actuelles, lesquelles ont inscrit des points dès leur premier Grand Prix ? Sauber peut lever la main avec le sourire puisqu’après de belles performances en Endurance, JJ Lehto réussit à finir cinquième à Kyalami en 1993, bien aidé par l’hécatombe sévissant ce jour-là : il était le dernier pilote ayant franchi la ligne ! Si Red Bull remplaçait Jaguar et partait donc d’une base existante, leur quatrième place en Australie il y a onze ans était on ne peut plus méritoire avec un David Coulthard qui se refaisait une santé et une réputation. Les deux monoplaces étaient d’ailleurs récompensées puisque Christian Klien, pur produit maison, finissait septième. Renault n’a pas connu cette chance lorsqu’elle expérimentait son moteur turbo mais l’équipe actuellement basée à Enstone avait repris un autre team-sponsor, en l’occurrence Benetton et un autre Autrichien, Gerhard Berger, finissait sixième à Rio en 1986 pour la première course de l’équipe multicolore. La victoire intervint en fin de saison à Mexico.

Enfin, même en exceptant les 500 Miles d’Indianapolis dans les années 50, Gene Haas ne peut se targuer d’être la première équipe Américaine à avoir brillé de la sorte : Shadow vit son pilote Georges Follmer finir sixième pour sa première course en Afrique du Sud en 1973. Si l’équipe révéla Alan Jones (qui offrit au fondateur Don Nichols sa seule victoire en Autriche 1977) ou Elio de Angelis, les historiens français ne peuvent que regretter les efforts mal récompensés de Jean-Pierre Jarier. Le Français méritait bien son surnom de « Godasse de Plomb » avec deux superbes poles en 1975 et une domination inachevée à Interlagos mais hélas, sa malchance n’avait rien à envier à celle de Chris Amon

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